Le centre de self-stockage d’A Chacun Son Box avait toujours été un lieu calme et sécurisé, fréquenté par des clients qui venaient déposer ou récupérer leurs affaires sans jamais se soucier de ce qui pouvait se passer autour. Pourtant, une rumeur grandissait depuis des mois, discrète, entre ceux qui travaillaient là-bas : le Box numéro 87. Aucun employé ne voulait en parler ouvertement, mais les regards nerveux et les silences pesants en disaient long. Il y avait quelque chose d’étrange, de malsain.
Tout a commencé l’année précédente, lorsqu’une femme du nom de Claire, récemment divorcée, loua ce box pour y stocker ses meubles en attendant de trouver un nouveau logement. Claire était une femme ordinaire, sans histoire, mais depuis son divorce, ses amis la voyaient peu à peu sombrer dans une forme de paranoïa. Elle prétendait que quelqu’un la suivait, qu’elle entendait des bruits étranges dans son appartement vide. Mais personne ne la croyait. Ses amis lui disaient qu’elle était juste stressée, que tout irait mieux une fois qu’elle aurait retrouvé sa stabilité.
Un soir, après une longue journée, Claire se rendit au centre de stockage pour déposer quelques cartons supplémentaires dans son box. Le lieu était désert, les lumières légèrement vacillantes, créant une ambiance oppressante. Arrivée devant le box 87, elle remarqua que la porte semblait avoir été déplacée. Pourtant, elle se souvenait l’avoir bien fermée la dernière fois. Inquiète, elle pensa d’abord à un cambriolage.
En ouvrant la porte, ce qui l’attendait n’était pas des voleurs. Non… quelque chose de bien plus terrifiant. À l’intérieur du box, tout semblait à première vue en ordre, mais une sensation glacée envahit Claire. Le fond de la pièce était étrangement sombre, malgré l’éclairage. Soudain, un bruit sourd résonna, comme si quelque chose bougeait dans un coin. Claire sentit son cœur s’accélérer. Elle approcha, tremblante, essayant de distinguer ce qui se passait dans l’obscurité. C’est alors qu’elle vit, derrière un grand miroir recouvert de poussière, une forme bouger.
Paniquée, elle recula d’un bond et laissa tomber un des cartons qu’elle tenait. Mais avant même qu’elle ait le temps de fuir, une voix basse et glaciale résonna dans le box, venant de nulle part :
« Je t’attendais… Claire. »
Figée de terreur, elle tourna la tête lentement. Le miroir semblait maintenant la refléter différemment : ce n’était plus son propre visage, mais celui d’un homme au regard vide, déformé par la haine. Cet homme, elle le connaissait. C’était son ex-mari, Antoine. Mais Antoine était mort deux mois après leur divorce, dans un accident de voiture.
Claire ne comprenait pas ce qu’elle voyait. Elle se rapprocha instinctivement du miroir, comme hypnotisée par cette image. L’homme la fixait, son visage devenant de plus en plus défiguré, la peau se détachant lentement de son crâne, révélant un sourire horrible et une mâchoire béante. Ses mains semblaient vouloir sortir du miroir, se tendant vers elle. En une fraction de seconde, le visage décomposé poussa un cri déchirant, et Claire hurla à son tour, repoussée brutalement contre la paroi du box. La porte du box claqua avec une violence inouïe, la plongeant dans l’obscurité totale.
Elle fut retrouvée le lendemain matin, recroquevillée au fond du box, totalement catatonique. Ses mains étaient couvertes de griffures profondes, comme si elle s’était battue contre quelque chose… ou contre elle-même. Les autorités ne trouvèrent aucune trace d’effraction, aucun signe de lutte, rien qui puisse expliquer ce qui s’était passé. Claire fut internée dans un hôpital psychiatrique. Elle ne parlait plus, ne bougeait plus. Les médecins disaient qu’elle était dans un état de choc irréversible, qu’elle ne pourrait probablement jamais raconter ce qu’elle avait vu.
Cependant, une semaine plus tard, un autre locataire, un jeune homme du nom de Maxime, demanda à louer un box. Le seul disponible à ce moment-là ? Le numéro 87. Les employés, bien que mal à l’aise, n’eurent pas d’autre choix que de le lui attribuer. Maxime, insouciant, commença à y entreposer des outils de bricolage et du matériel de rénovation pour son nouveau projet immobilier. Tout se passait normalement, jusqu’au jour où, après avoir refermé son box, il reçut un appel étrange sur son téléphone. Un numéro inconnu.
Il décrocha et, au bout du fil, une voix rauque chuchota :
« Il est ici. »
Maxime raccrocha, croyant à une mauvaise blague. Mais les appels continuèrent, de plus en plus insistants. Chaque nuit. Toujours la même voix. Toujours les mêmes mots. « Il est ici. » Désespéré, il retourna au box pour vérifier, pensant que quelqu’un s’était introduit à l’intérieur pour lui faire peur.
Lorsqu’il ouvrit la porte, tout semblait normal… jusqu’à ce qu’il sente un souffle glacé dans sa nuque. Avant qu’il n’ait le temps de réagir, la porte se referma violemment derrière lui, plongeant l’espace dans une obscurité totale. La lumière clignota une fois, deux fois… puis un rire effrayant, déformé, résonna dans tout le box.
Maxime fut retrouvé deux jours plus tard, enfermé dans le box 87. Ses cheveux étaient devenus entièrement blancs, et il répétait sans cesse la même phrase :
« Il est ici… Il est ici… Il est ici… »
Depuis, le box numéro 87 est scellé, interdit à la location. Mais parfois, quand le centre est vide, certains employés disent entendre des murmures qui s’échappent de derrière la porte. Ils disent que quelque chose… ou quelqu’un… y est encore enfermé.
Et la rumeur persiste : si vous ouvrez le box 87, vous ne ressortirez jamais indemne. Il vous attend.